Actualité 21.02.2015

Québec n’est pas la Chine, encore moins Dubaï !

Source: Groupe Dallaire

Je me souviendrai toujours de cette présentation au World Architecture Festival (WAF) durant laquelle un architecte chinois vantait sa plus récente réalisation devant un parterre de journalistes internationaux.

Le chantier venait à peine de se terminer et il en était extrêmement fier. Je pouvais le comprendre. Non seulement il venait d’achever un de ses plus importants projets en carrière, mais c’était également un édifice fort intéressant sur le plan architectural.

Mais curieusement, son principal argument pour mettre en valeur sa réalisation auprès du jury du WAF n’était pas l’avant-gardisme de sa structure, ni son côté écologique. L’architecte se targuait plutôt d’avoir réalisé le plus haut et le plus gros bâtiment de la ville. Il venait de bâtir le nouveau « phare » de l’endroit, comme si la qualité de son projet était directement proportionnelle à sa taille.

Suite à la présentation, je n’avais pu m’empêcher d’écouter un groupe d’architectes danois, mexicains et suédois qui discutaient de ce qu’ils venaient de voir. Ironiquement, ce qui clochait avant tout dans ce projet selon eux, c’était son échelle démesurée pour le quartier. Un avis que je partageais pleinement.

« Well, it’s China! » avait lancé l’un d’eux avant de quitter la salle. Un commentaire cliché dans les circonstances, mais qui reflétait tout de même bien la mentalité chinoise en architecture contemporaine. On souhaite s’imposer et marquer l’imaginaire, coûte que coûte. C’est culturel, c’est l’ego chinois.

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Ce souvenir m’est rapidement revenu en tête hier après-midi en visionnant la vidéo promotionnelle du Groupe Dallaire pour le futur Phare de Québec.

 

 

Ma première réaction après le visionnement a été de contacter un architecte de la Veille Capitale pour obtenir son avis sur le sujet. Notre conversation se résume en deux mots: Mais pourquoi?

Comme l’expliquait le chroniqueur du Soleil, François Bourque, dans un récent texte, « on construit 50 étages quand un quartier est à maturité et atteint une certaine densité. La hauteur devient alors le moyen de poursuivre le développement ».

Or, ce n’est pas le cas dans l’axe d’affaires du boulevard Laurier où l’on souhaite implanter ce fameux Phare. Des stationnements et des sites vacants qui gagneraient à être requalifiés, il en existe plus d’un. Ce sont des espaces où il serait possible de créer de multiples projets à l’échelle humaine qui pourraient redéfinir complètement la qualité de vie du secteur en fonction du programme particulier d’urbanisme (PPU) récemment adopté.

Pourquoi donc opter pour ce mastodonte qui modifiera à tout jamais le paysage de Québec?

 
MH

 

C’est en lisant le communiqué du promoteur que j’ai trouvé ma réponse. « Il y a plus d’un an, le Maire de Québec nous lançait un appel en nous invitant à créer un immeuble phare à l’entrée de la ville. Un élément signal qui donnerait à notre belle ville, un nouveau visage reconnu de tous. »

C’est donc ça: l’ego de Régis Labeaume. Un ego qui laisse tristement transparaître son manque de culture architecturale et de créativité pour faire rayonner sa ville.

MH

 

Pour lui, un centre-ville « moderne » passe par l’importation d’une pâle copie des projets de Dubaï et de la Chine. La meilleure stratégie pour offrir une « signature distinctive » à Québec, c’est de planter une immense tour qui entrera en compétition avec les autres grandes villes canadiennes. « La tour principale s’élèvera dans le ciel de la Ville de Québec pour devenir l’immeuble le plus haut à l’est de Toronto », peut-on lire dans le communiqué officiel. So what?

 

MH

 

Cette vision urbanistique et architecturale développée au nom de la « modernité » est désolante. Pourquoi miser sur du tape-à-l’œil plutôt que sur un modèle de développement urbain adapté aux réalités de la ville de Québec?

J’espère sincèrement que les architectes de la Veille Capitale se mobiliseront afin d’empêcher que le complexe d’infériorité de leur maire ne vienne dénaturer à tout jamais l’échelle de leur ville.