Actualité 30.01.2016

La folie des hauteurs de Québec et Gatineau: besoin ou ego démesuré?

Plongé hier soir dans le plus récent livre du professeur à l’Institut d’urbanisme de Paris Thierry Paquot, baptisé Désastres urbains: les villes meurent aussi, je suis tombé sur un passage très intéressant dans lequel il s’insurge contre la manie des grandes villes, dont Paris, à favoriser l’érection de tours commerciales et résidentielles «au nom de la modernité».

«Pour sa construction, le gratte-ciel réclame des matériaux sophistiqués (vitrage, aciers spéciaux, etc.) particulièrement énergivores. Avant même de fonctionner, la tour est dispendieuse. Un mètre carré de tour coûte plus cher qu’un mètre carré d’un immeuble de quelques étages (l’architecte Françoise-Hélène Jourda a chiffré, en 2012, ce différentiel à au moins 20%).»

Quelques lignes plus loin, il poursuit avec ceci:

«Sans réel argument, ils [les politiciens et promoteurs] se contentent de répéter que “c’est moderne”, que les villes à la mode en érigent (Londres, Barcelone, Dubaï, Shanghai…), ou bien ils adoptent une sorte de fatalisme (“c’est l’avenir, on n’y peut rien”)… Pas un mot sur leur habitabilité, aucune analyse urbaine sur les atouts du gratte-ciel par rapport à l’immeuble haussmannien ou contemporain, aucune étude chiffrée sur leur coût énergétique, […] aucune étude environnementale sur la notion “floue” de “densité” […].»

En lisant de tels passages, je ne peux nier avoir eu une petite pensée pour le Phare de Québec et la Place des Peuples à Gatineau. Après tout, les réflexions de Thierry Paquot sont aussi valides pour ces deux projets québécois qui donnent le vertige.

 

Phare de Québec

Place des Peuples / Gatineau

 

Comment justifie-t-on des édifices aussi hauts alors qu’on pourrait densifier leur quartier respectif autrement? A-t-on réellement évalué l’impact énergétique qu’auraient les tours de Québec et de Gatineau sur leur milieu comparativement à des bâtiments plus modestes? A-t-on évalué leur impact sur la mobilité urbaine considérant que des centaines, voire des milliers, de personnes y convergeraient chaque jour (pour la majorité en voiture)?

Les politiciens et les promoteurs se font très discrets sur ces questions. On parle de modernité, de développement économique régional, d’architecture identitaire… Mais encore? Est-ce un réel besoin de densifier aussi haut?

J’ai plutôt l’impression que nos politiciens sont à la solde des grands promoteurs voyant les revenus fonciers que généreront ces immense structures dans leurs coffres municipaux…