L’OAQ et l’AAPPQ parmi les signataires d’une lettre dans le cadre du projet de loi no. 41
Lettre adressée à Madame Jennifer Maccarone, députée de Westmount–Saint-Louis et présidente, Commission des transports et de l’environnement :
“Madame la Députée,
Nous vous écrivons aujourd’hui, en vos qualités de présidente de la commission des transports et de l’environnement, dans le cadre des consultations particulières et auditions publiques du projet de loi n°41 (Loi édictant la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique), qui vise à améliorer la performance environnementale des bâtiments.
Les organisations signataires de cette lettre, à titre de partenaires de l’industrie de la construction, souhaitent adresser aux députés membres de la commission leur inquiétude envers un élément précis du projet de loi.
D’emblée, nous tenons à être clair : le secteur de la construction est d’accord avec l’orientation générale d’améliorer la performance environnementale des bâtiments, et salue donc la volonté gouvernementale à cet effet. Nous croyons en l’importance d’avoir des bâtiments (habitations, commerces, institutions) qui ont une meilleure efficacité énergétique et une performance environnementale accrue, contribuant plus activement à la décarbonation de l’économie et à la lutte aux changements climatiques. Notre préoccupation quant au projet de loi n’en est donc pas une de fond, mais de mise en oeuvre de cette intention.
Un obstacle dans la marche vers un code de construction unique au Canada
Depuis 10 ans, d’importants travaux ont été réalisés par les partenaires de l’industrie et les gouvernements du Québec et du Canada afin de simplifier les règles et limiter le nombre de codes de construction en vigueur, notamment dans un souci d’allègement du fardeau réglementaire et administratif. Pas plus tard qu’en novembre dernier, la Loi modifiant diverses dispositions principalement aux fins d’allègement du fardeau réglementaire et administratif est venue confirmer « un premier pas vers le code unique en construction »1.
Cette disposition, rattachée à l’engagement 24 du Plan d’action gouvernemental en matière d’allègement réglementaire et administratif 2020-2025, constitue l’une des plus importantes simplifications réglementaires dans la construction depuis de nombreuses années. Elle permet même, grâce aux travaux effectués avec les autres provinces via la Table stratégique canadienne sur l’harmonisation des codes de construction (Table stratégique des codes) et le Comité canadien de l’harmonisation des codes de construction (CCHCC), d’envisager un code de la construction unique au Canada d’ici 2030.
Or, sur cet élément précis, le projet de loi n°41 nous apparait être un recul important, alors que partout au pays, les décideurs cherchent urgemment à accélérer la construction.
Depuis 2012, le code de construction contient des exigences qui concernent précisément l’efficacité énergétique et la ventilation, et le 13 mai 2020, il était modifié pour insérer le chapitre Efficacité énergétique du bâtiment (réf : Décret 486-2020).
Tel que libellé, l’article 2 du projet de loi retire l’efficacité énergétique des bâtiments du code de construction, pour transférer cette responsabilité de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) au ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP), lequel pourra ajouter des exigences par voie de règlement. Une partie de la réglementation se retrouvera alors à l’extérieur du code de construction, ce qui se traduira inévitablement par une complexité supplémentaire ou des risques de contradiction pour les concepteurs, les entrepreneurs en construction et les inspecteurs. À ce titre, nous soutenons que la cohérence et la clarté contribuent largement à assurer la protection du public, notamment parce qu’elles favorisent une compréhension partagée des normes en vigueur.
Recommandation
Il va sans dire que nous reconnaissons la compétence du MELCCFP en matière de performance environnementale des bâtiments, mais cette contribution à l’encadrement en cette matière ne doit pas se traduire par une complexité supplémentaire pour les entrepreneurs en construction et les professionnels quant à l’interprétation des exigences qui doivent s’appliquer en matière d’efficacité et de qualité des travaux.
Nous pensons qu’il faut travailler à ne pas compromettre l’agilité tout récemment gagnée et après tant d’efforts, tout en faisant appel à l’expertise du MELCCFP. Nous sommes convaincus que des cibles de performance environnementale peuvent être édictées par le MELCCFP, mais que celles-ci peuvent être appliquées par la RBQ.
Nous vous remercions, Madame la Députée, de l’attention que vous accorderez à la présente et vous assurons de toute notre disponibilité pour en discuter.
Veuillez agréer nos meilleures salutations,
Jean-François Arbour, président
Association de la construction du Québec (ACQ)
Richard A. Fortin, président
Association des architectes en pratique privée du Québec (AAPPQ)
Maxime Rodrigue, président–directeur général
Association des professionnels de la construction et de l’Habitation (APCHQ)
Éric Côté, président–directeur général
Corporation des entrepreneurs généraux du Québec (CEGQ)
Erik Kingsbury, président
Corporation des maîtres électriciens du Québec (CMEQ)
Denis Beauchamp, président
Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec (CMMTQ)
Gina Gaudreault, présidente
Fédération québécoise des associations d’entrepreneurs spécialisés en construction (FQAESC)
Sophie Larivière-Mantha, présidente
Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ)
Pierre Corriveau, président
Ordre des architectes du Québec (OAQ)”
Pour consulter l’intégral de la lettre…
Extrait de la lettre de l’Ordre des architectes du Québec spécifique au projet de loi no. 41 :
“Commentaires généraux
L’Ordre des architectes du Québec appuie l’intention générale du projet de loi et considère essentiel que le gouvernement prenne des mesures fortes en plus d’entreprendre des actions vigoureuses pour accélérer la décarbonation des bâtiments au Québec. À cet effet, il salue notamment les systèmes de cotation et de divulgation mis de l’avant dans le projet de loi.
Nous sommes d’avis qu’atteindre la carboneutralité d’ici à 2050 nécessite indubitablement de revoir nos façons de concevoir, de bâtir, de consommer, d’entretenir et de déconstruire dans le secteur du bâtiment. Il est donc essentiel de généraliser autant que possible des pratiques exemplaires prenant en considération tout le cycle de vie des bâtiments, incluant leur démolition ou déconstruction éventuelle.
En effet, le secteur du bâtiment est vivement interpellé pour participer aux efforts de réduction des GES, et pour cause. Sur le territoire montréalais, le secteur du bâtiment représente environ 30 % des émissions de gaz à effet de serre. Le Conseil du bâtiment durable du Canada est d’avis qu’un vaste chantier de modernisation, de rénovation et de décarbonation des bâtiments doit être entrepris pour que le Canada atteigne ses cibles climatiques de 2030 et 2050. Ce chantier sollicitera inévitablement l’expertise des architectes et de l’ensemble de l’industrie de la construction.
[…]
Expertise des architectes
Le projet de loi prévoit que les propriétaires d’un bâtiment devront transmettre au ministre la cote de performance environnementale attribuée à leur bâtiment conformément à la méthode et aux modalités prévues par règlement (art. 6). Afin que les évaluations reflètent la réalité et qu’elles inspirent confiance, l’Ordre est d’avis que les diagnostics de performance environnementale devront être posés par des experts indépendants, dont la compétence et l’intégrité sont encadrées.
À cet égard, l’Ordre estime que les architectes détiennent la formation et les compétences requises pour cet exercice. Qu’il soit question d’analyse du cycle de vie, de performance énergétique de l’enveloppe du bâtiment ou d’intégration de matériaux visant une meilleure qualité de l’air intérieur, les architectes contribuent depuis longtemps à la performance environnementale du cadre bâti. La mise en application des concepts précités nécessite des connaissances variées que possèdent les architectes, mais également une maîtrise de divers outils de calculs, de simulation et de modélisation d’usage courant chez ceux-ci.
L’Ordre recommande par conséquent que soit intégrée au projet de loi l’habilitation des architectes à attribuer des cotes de performance (à l’article 6), ainsi que celle à rédiger des rapports sur la performance environnementale d’un bâtiment (à l’article 11).”