Actualité 22.10.2016

Concours pour la relève: la Promenade Fleury, un exemple à suivre!

Un texte de Marie-Claude Plourde

 

Alors que la culture des concours d’architecture est bien établie en Europe, elle se taille une place de plus en plus enviable chez nous, notamment grâce au labeur du Bureau du design de la Ville de Montréal.

Depuis 2006, cette instance fait honneur au titre de Ville UNESCO de design de notre métropole, ayant tenu pas moins de 51 concours de design et d’architecture, et ce, malgré les multiples obstacles rencontrés en cours de route.

Bien que je sois indéniablement en faveur de cette pratique lorsque l’occasion le justifie, il m’est néanmoins arrivé de m’interroger sur sa congruence avec des enjeux sociaux et de participation. Dans le cas de projets d’aménagement public, par exemple, comment pouvons-nous nous assurer de la représentativité des besoins des usagers à travers les différentes étapes d’un concours, de la commande jusqu’à la nomination du finaliste (et ultimement du projet final)?

Mes doutes se sont cependant estompés suite à la récente annonce des lauréats du concours de design de la Promenade Fleury, qui vise à mettre en valeur l’artère commerciale avec une intervention semi-pérenne. Car, d’une part, les démarches de la jeune équipe lauréate témoignent autant de la capacité de la relève en design à assumer le rôle de médiateur entre les citoyens et l’aménagement du domaine public, que de la prédisposition des concours à permettre cette médiation. D’autre part, ce choix démontre l’ouverture d’esprit des praticiens siégeant sur les jurys, étant visiblement réceptifs à des propositions sortant des cadres conventionnels.

Résultat: le collectif lauréat, créé de manière spontanée spécifiquement pour ce concours, réalisera, en 2017, une série d’installations mariant mémoire, identité, usages actuels et besoins de cet important tronçon d’Ahunstic-Cartierville. Leur proposition est le résultat d’une recherche minutieuse sur l’histoire et l’évolution de l’artère, mais également de rencontres avec les commerçants pour découvrir leur identité et leurs besoins. Qui sont-ils? Qu’est-ce qui les intéresse? Qui fréquentent-ils et qui fréquentent leurs commerces?

Ce processus a mené à une proposition distinctive baptisée Courtepointe. Quinze courtepointes raconteront ainsi un fragment de l’histoire de la rue Fleury et de ses environs. Ces pans verticaux s’élèveront ponctuellement sur la Promenade afin que petits et grands, accompagnés des commerçants, puissent se raconter Fleury de manière ludique tout au long de l’année.

 

Crédit © Giasson, Hardy, Ianniciello, Proulx, Tu

Crédit © Giasson, Hardy, Ianniciello, Proulx, Tu

Crédit © Giasson, Hardy, Ianniciello, Proulx, Tu

Crédit © Giasson, Hardy, Ianniciello, Proulx, Tu

 

L’effet Courtepointe pourra même se transposer à l’échelle du quartier, tel un agencement des parcelles de mémoire y étant éparpillées. Des voisins, longtemps inconnus, dont les histoires sont intriquées à celle du quartier, pourront enfin nouer des liens en ayant l’opportunité de partager leurs souvenirs.

Cette intervention offrira un nouveau type d’expérience urbaine: une programmatique interactive immanente à chacun des objets de la Courtepointe, devenant un prétexte à la discussion, un nouveau mode de contemplation dans une posture autre qu’assise et une déambulation possible durant toutes les saisons.

 

Crédit © Giasson, Hardy, Ianniciello, Proulx, Tu

Crédit © Giasson, Hardy, Ianniciello, Proulx, Tu

 

C’est dire qu’enfin, nous avons évité l’installation de plus de mobiliers, placettes et parklets, disposés à travers la ville avec un accroissement déconcertant, et ce, sans vision globale. Étant souvent désertés, ces lieux de repos n’offrent souvent aucun motif aux dialogues spontanés, à la rencontre nouvelle ou au divertissement.

Je félicite donc la SDC de la Promenade Fleury pour ce concours. Prendre ainsi part à ce mouvement offre un grand soutien au combat du Bureau du design, qui milite pour une augmentation des concours. Considérant que l’accès aux concours d’architecture pour les agences émergentes reste encore trop difficile, voire impossible, ceux portant sur des installations dans l’espace public deviennent visiblement de belles alternatives pour la relève.

 

 

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Photo: Kévin Grégoire

Photo: Kévin Grégoire

Marie-Claude est d’abord diplômée au baccalauréat en Architecture de l’Université de Montréal et est actuellement doctorante en Communication à l’UQAM. C’est en réponse à quelques années de pratique au sein de la firme de génie-conseil Nordic Structures Bois qu’elle a opté pour un retour aux études, non pas en architecture, mais vers les cycles supérieurs en communication afin d’approfondir sa réflexion sur les processus collaboratifs dans le milieu de l’aménagement.
Son passage dans l’équipe de l’Association du design urbain du Québec (ADUQ) ces dernières années a fortement alimenté sa problématique de recherche en la sensibilisant à la présence des citoyens et des usagers comme acteurs de premier plan dans toute démarche d’aménagement. C’est notamment ce qui explique, aujourd’hui, sa réflexion doctorale sur le développement des bases d’une démarche créative en aménagement, considérant l’ensemble des dimensions d’un contexte local – de l’identité culturelle à ses caractéristiques biotopiques, ainsi qu’à la mise à contribution du corps et du jeu avec la matière.